On suit fébrilement depuis mai dernier l’évolution des événements au Nord-Kivu en RDC où la guerre civile a repris de plus belle.
Ces événements nous intéressent particulièrement puisque le Rwanda est mis en cause dans le conflit, accusé par l’ONU de soutenir financièrement, humainement et militairement le Mouvement du M23, à l’origine du retour de l’instabilité à l’est de la RDC. Récemment, l’Ouganda a également été soupçonné par des ONG d’appuyer la rébellion.
Drôle de climat pour des vacances, n’est-ce pas ?
Mais au delà de la menace qui pèse sur notre projet personnel, c’est la situation dramatique que vivent les civils depuis 15 ans qui nous saute enfin aux yeux. Jamais nous nous étions vraiment intéressés à la situation de la RDC et notre intérêt pour les gorilles nous a conduit tout droit dans l’histoire chaotique et inextricable de cette région du monde, convoitée et sacrifiée pour les ressources minières et pétrolières qu’elle détient au détriment de la population et de la richesse de son environnement .
Les raisons de cette instabilité chronique sont particulièrement difficiles à saisir pour des novices comme nous. Elles demandent quasiment de revenir au temps de la colonisation, puis de la décolonisation, puis au génocide rwandais, puis aux précédentes guerres civiles …
Sans refaire toute l’histoire (on en serait incapable …), voici plutôt ce qu’on a compris des mouvements armés qui sévissent de façon préoccupante dans l’est de la RDC :
Le M23 tient son nom du « Mouvement du 23 mars » en référence à la date des accords de paix signés en 2009 et se compose d’anciens membres du CNDP (Congrès National pour la Défense du Peuple, mouvement politico-militaire pro-tutsi dirigé par Laurent Nkunda). Ils se définissent eux mêmes comme des « rebelles (contre le gouvernement congolais) et un nouveau courant du Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP). » Intégrés à l’armée régulière depuis 2009, ils se sont mutinés au printemps dernier et revendiquent la pleine application des accords de paix.
Ce mouvement a déclenché l’instabilité de la région, favorisant le retour à la violence de l’ensemble des mouvements rebelles sévissant dans le Kivu depuis des années. Et c’est là toute la complexité des choses :
Les milices congolaises Maï Maï sont un autre acteur de la guerre civile, plus ou moins ennemis de tous et ennemis entre eux. Il s’agit de groupes armés locaux très violents agissant pour leur propre compte, initialement au nom d’une certaine auto-défense, mais s’étant souvent associés à des groupes rebelles hutus. Ils sont divisés en plusieurs milices « régionales » et font régner la terreur sur leur territoire en organisant des massacres, des viols, des pillages et en recrutant des enfants-soldats. C’est par exemple le groupe Maï MaÏ Simba, conduit par un braconnier sanguinaire surnommé Morgan, qui s’est tragiquement illustré en juin dernier dans la réserve d’okapis d’Epulu en pillant et détruisant le quartier général du parc et en tuant sauvagement les 14 okapis captifs ainsi que 5 rangers.
Les Maï Maï n’ont pas de revendications dans le conflit actuel, ils sont des opportunistes qui représentent une menace sérieuse pour les populations civiles et pour les activités économiques du Kivu depuis leur création dans les années 60.
Les FDLR (Forces Démocratiques de Libération du Rwanda) sont un mouvement créé en 2000 par les ex-génicodaires rwandais dans le but de protéger les hutus réfugiés en RDC. Le Rwanda accuse régulièrement le gouvernement congolais de leur apporter son soutien. Les différents groupes qui composent les FDLR sont sans doute les plus violents, commettant encore de véritables crimes de guerre, et s’adonnant volontiers à des pillages, des tortures, des persécutions et au recrutement d’enfants soldats. Comme les Maï Maï, les FDLR profitent de l’instabilité pour revenir sur le devant de la scène, recherchant toujours le renversement du pouvoir tusti au Rwanda sur fond de guerre « ethnique » et de contrôle des ressources naturelles.
Plus au Nord et jusqu’en Ituri, il faut encore ajouter l’ADF-Nalu, groupe islamiste d’origine ougandaise, le LRA (L’Armée de Résistance du Seigneur) du sinistre Joseph Koni, Les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), La Force de résistance patriotique en Ituri (FRPI) … sans compter les petits groupes agissant très localement et représentant des entités moins figées mais tout aussi menaçantes.
Face à toutes ces milices, 2 forces régulières sont présentes sur le terrain :
- Les FARDC, ou Forces Armées de la RDC ou armée régulière, envoyées par le gouvernement congolais
- La Monusco, envoyée par l’ONU et ayant pour mission principale de protéger les civils
Le Parc National des Virunga est particulièrement touché par les mouvements armés qui occupent les forêts de son territoire. Emmanuel de Merode, directeur du parc, a publié une carte des différents groupes, accompagnée d’une description qui clarifie grandement notre compréhension des choses, même s’il faut rapporter ses propos à une zone géographique plus vaste, comprenant le Sud-Kivu, le Nord-Kivu et l’Ituri :
Aujourd’hui, la situation politique a tendance à stagner malgré les efforts diplomatiques entrepris par les 3 pays principaux impliqués et par les autres pays des Grands Lacs.
Nous concernant, il n’est pas déconseillé de se rendre au Rwanda ou en Ouganda même si le ministère des affaires étrangères a émis une recommandation récente sur l’Ouganda :
« En raison des troubles dans la République Démocratique du Congo voisine, il est déconseillé aux voyageurs de se rendre dans le parc de Mgahinga (district de Kisoro). La situation étant volatile, il est également recommandé de se renseigner sur la situation sécuritaire dans les zones frontalières des districts de Kisoro et Kanungu, y compris le parc national de Bwindi. »
Nos contacts ougandais nous ont néanmoins rassuré sur cette alerte en nous expliquant que le programme que nous avons prévu ne pose à ce jour aucun problème (Bwindi y compris !). Le service de conseil aux voyageurs anglais nuance aussi la recommandation française (leur site donne d’ailleurs des informations particulièrement complètes concernant l’Ouganda). De toutes façons, on avisera sur place si les choses venaient à se dégrader. On garde l’oeil ouvert … et on souhaite aux congolais de retrouver la paix rapidement …
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Ressources
- Début 2014 : Réouverture du parc des Virunga !, par visitvirunga
- 12 décembre 2013 : RDC, accord de paix gouvernement-M23, par RFI
- 20 Novembre 2013 : Les forces en présence dans la guerre du Kivu, infographie par Le Monde
- 05 Novembre 2013 : En RDC, les rebelles du M23 annoncent leur abandon de la lutte armée, par Le Monde
- 07 Décembre 2012 : Récents affrontements dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) : avril-novembre 2012 (Google Map), par International Crisis Group (ICG)
- 21 Novembre 2012 : Qui sont les rebelles du M23 ?, par Géopolis
- 02 Octobre 2012 : L’Est du Congo : pourquoi la stabilisation a échoué, par International Crisis Group (ICG)
- 22 Août 2012 : RDC : dix points clés pour comprendre la guerre au Nord-Kivu, par rue89
- 11 Juillet 2012 : L’or noir au Congo : risque d’instabilité ou opportunité de développement ?, par International Crisis Group (ICG)
- 20 Août 2012 : Les spécialistes appellent cela « la malédiction des ressources » : plus un pays possède de richesses naturelles, plus il souffre de prédation et moins sa population profite de cette manne financière., par Save Virunga
- 30 Juin 2011 : Le conflit au Congo, la vérité dévoilé [/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container][fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][Vidéo], par Congo Justice
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Voici le papier de frédéric Encel dans la chronique internationale sur France Inter le lundi 6 aout 2012. le message n’est pas porteur d’un grand optimisme…il rejoint hélas l’analyse que vous publiez… effectivement, même si les tensions actuelles dans cette région reviennent au devant de l’actualité, elles ne doivent pas être de nature à abandonner un projet..vigilance et prudence doivent permettre de mener à bien ce séjour!!
Ci-dessous le papier de Frédéric Encel:
« Afrique des grands lacs , ce chaos oublié..
Il est des régions du monde dont on parle beaucoup, d’autres qu’on ignore. Il est des victimes ayant tous les égards des médias et ceux des intellectuels, il en est d’autres -infiniment plus nombreuses- qu’on choisit d’oublier. Ainsi dans le palmarès mondial du malheur des hommes organisé par d’autres hommes, l’Afrique des grands lacs affiche sa suprématie toutes catégories depuis 20 ans sans discontinuer. Dans cette vaste région -plusieurs fois la France tout de même- qui comprend l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi et l’est du Congo-Kinshasa, entre 4 et 5 millions de personnes ont été tuées, ou sont mortes des suites directes de la guerre ou des persécutions.
Dans le palmarès mondial des malheurs des hommes organisés par d’autres hommes, l’Afrique des grands lacs affiche sa suprématie toutes catégories confondues depuis 20 ans sans discontinuer ..
Ca commence avec le Rwanda 3em grand génocide du 20em siècle, 800 000 mille morts selon l’ONU, tous civils, en 3 mois, assassinés généralement au gourdin ou à la machette sous un rythme de morts équivalent à celui des camps nazis dans ce que l’Africaniste Jean Pierre Chrétien appela « un nazisme tropical ».
Conséquences géopolitiques directes de cet apocalypse furent les guerres de 96 et 98 menées sur le sol Congolais par plusieurs armées Africaines, guerres systématiquement accompagnées de viols, de massacres de civils et d’expulsions dans les forêts équatoriales…les Seigneurs de la guerre, prétendant lutter pour la démocratie, ont remplacé les états (défaillants) et « guerroient » dans ces zones au sous-sols excessivement riches du Kivu et de Liturie à l’est de l’immense Congo …
Alors pourquoi la « non intervention » (des grandes démocraties mondiales ») c’est plus facile de traiter avec des mercenaires pour négocier l’or, les diamants et le coltan car toute intervention serait dangereuse et se payerait cash! Devant nos enfants, face à ce drame humain, on pourra évoquer le kilomètre émotion, la complexité du problème, mais on ne pourra pas dire qu’on ne savait pas… »
Ah oui le podcast C mieux..ça C une chose que je ne sais pas faire..ça ne doit pas être trop compliqué pourtant!
Bonne fin de préparation,…. nous bouclons les sacs, départ dimanche matin …
A bientôt sur ton blog,
Alain et Marie
Merci Alain ! Je me permets d’ajouter le lien pour écouter directement la chronique !
Au moins, quelqu’un en aura quand même parlé en France …
Bon voyage à tous les deux et donnez des nouvelles !